A ma petite mamie chérie
Voilà, tu nous as quitté physiquement il y a quelques jours, en ce début de printemps. 92 ans quand-même, tu as bien vécu selon toi.
Tu en avais surtout marre les derniers temps. Les douleurs de ton corps et le manque de mobilité te faisaient comprendre que la délivrance se rapprochait de jour en jour...
Je t'aime ma petite mamie chérie et au combien je me souviens de notre dernière entrevue l'été dernier où tu me disais "je me fais chier, ça sert à rien de rester comme ça dans cet état. Je ne peux plus rien faire !". On sentait l'appel à la liberté, l'appel à ne plus traîner ce corps qui devenait pour toi un boulet.
Voilà, tu es partie. Tu m'as tout appris. Tu as été comme une seconde mère pour moi et tu le sais. Surtout ne t'arrête pas devant ces êtres de lumières qui pourraient te demander de choisir de revenir par ici....non....continue ta route....fonce !
Je sens ta présence calme. Je n 'oublie pas non plus tes mots, il y a quelques jours alors que je travaillais auprès d'un sénior "On m'a ramassée comme une merde", me dis-tu soudain. Je ne pu m'empêcher d'éclater de rire...je reconnais bien ton humour mamie.
Effectivement, l'infirmière t'a retrouvée étendue sur le sol, sans vie, au petit matin. Tu as perdu l'équilibre, tu n'as pas pu te relever et tu as fait un arrêt cardiaque. Tu es restée inanimée sur ce sol de marbre glacé.
Et oui ma petite mamie chérie, comme tu as pu le constater, nous ne sommes RIEN ici. Tu as beau être distingué(e), tu as beau vouloir conserver une image satisfaisante de toi-même vis à vis de la société et bien ne t'inquiète pas, on te ramassera comme un déchet le jour venu...car ainsi est ta délivrance de ce corps de chair.
Petite mamie chérie, je t'aime. Même ces mots et ce rôle que tu as porté n'ont désormais plus aucun sens pour toi.
Amuse-toi bien.
Ta fille d'adoption.
